« Cette infime tourmente d’encre qui est, à elle seule, tout un monde en son silence » Ré-interroger sans cesse cette fascination exercée par le geste faisant signe, par sa puissance d’évocation, un geste qui devient trace, empreinte allant jusqu’à l’extrême concision, dépouillé de tout surplus de matière, un geste radical pour parvenir au « presque rien ». Il n’y a rien ici à reconnaître, simplement voir. Ce qui, à l’origine, par « l’Unique Trait de pinceau » avait un sens donné par la calligraphie ou inspiré par la contemplation de la nature, c’est, peu à peu, chez Christiane Vielle, transmué en un geste valable pour ce qu’il est, sans autre but ni détermination. Le geste seul inscrit le sens et ce qui est perçu est une sorte de fascinante révélation sans reconnaissance d’identité. La fonction du signe est simplement d’être là, comme une interrogation affirmative de l’existence. Encore faut-il ne jamais attribuer aux signes autre chose que leur simple présence qui permet à l’artiste de fixer des sensations extrêmement fugaces et subtiles. Le monde est ainsi toujours à déchiffrer, à comprendre, toujours renouvelé. Comme le passage furtif d’un oiseau sur l’ombre portée d’un nuage, il s’agit de capter le signe du vol et non l’oiseau. En ce sens, l’oiseau et les nuages ont disparu, restent la main de l’artiste et son pinceau sur la feuille blanche. Robert Kerrec